Peter Gethin n'est plus

« J’étais troisième dans la Curva Grande et tout le long de la dernière ligne droite : c’était bon pour moi. Au freinage, Peterson a doublé Cevert et je l’ai suivi. Il était tangent et a pris l’extérieur pour se rattraper. J’ai enclenché une seconde vitesse longue, que je réservais spécialement pour ce dernier tour, et j’ai largement dépassé le régime permis, mais j’ai pu ainsi passer en tête et rester premier jusqu’à la ligne d’arrivée. »

C’est ainsi que Peter Gethin revenait sur sa victoire au Grand Prix d’Italie 1971, sa seule victoire en Formule Un, mais acquise au terme d’un dernier tour absolument époustouflant qui le vit devancer Ronnie Peterson pour un centième de seconde et Howden Ganley, son coéquipier chez BRM et 5ème sur la ligne d’arrivée, de 61 centièmes.

Né le 21 février 1940, dans le Surrey, ce fils de jockey préfère cependant les grosses cylindrées aux purs sangs. Lorsque le magazine Vintage Racecar lui demanda récemment, s’il y avait quelque chose de spécial dans cette région pouvant y expliquer l’éclosion de pilotes tels que Derek Bell, David Purley ou John Watson, dans un rayon de trente kilomètres, Gethin ironisait : « Je pense que ce serait comme dire que l’Ecosse était un vivier de pilotes de F1 parce que Jimmy Clark et Jackie Stewart en sont originaires. Non, je pense que c’était dû à la proximité avec le circuit de Goodwood. »

« J’ai commencé sur une Lotus Seven au début des années 1960, j’ai fait quelques courses, principalement à Brands Hatch. […] En 1965, j’ai débuté en Formule 3 avec Charles Lucas, Piers Courage et Jonathan Williams. En 1968, j’ai roulé en Sports Cars avec Chevron et en Formule 2 pour la Frank Lythgoe Racing. Notre Formule 2 Chevron B10 n’était pas aussi bonne que la Brabham BT23C, alors nous avons changé pour la Brabham en fin de saison. Ma deuxième place derrière la Matra d’Henri Pescarolo au Grand Prix d’Albi, fin octobre, est le résultat qui m’a permis, j’en suis sûr, de rejoindre le championnat Formule 5000 en 1969. Fin 1968 ou début 1969, je ne me rappelle plus vraiment du moment exact, la Formule 5000 Britannique fut créée. McLaren m’a approché, ou peut-être que c’était moi, encore une fois je ne suis pas sûr, mais on a travaillé ensemble. Ils ont déniché la Church Farm Racing qui était prête à faire rouler une voiture et nous avons participé au championnat inaugural. J’ai fait tous les tests pendant l’hiver avec Bruce McLaren. »

Le Britannique s’y impose d’ailleurs d’entrée face à l’expérimenté Trevor Taylor et conserve son titre en 1970 : « Bruce avait foi en moi et j’aime à penser que je lui ai donné raison en 1969. Ce fut également la preuve qu’il y avait une autre route qui menait à la F1, plutôt que simplement la F2 qui était le choix le plus populaire auprès des pilotes à l’époque. »

Pour, le destin allait précipiter la destinée du Britannique qui allait être choisi pour remplacer Bruce McLaren en Formule Un, le néo-zélandais s’étant tué lors des essais d’un châssis CanAm sur le circuit de Goodwood, le jour même où Gethin testait la McLaren M14. Petit clin d’œil du destin, c’est au Canada, la même année, que Gethin inscrira son premier point au championnat du monde, avec une sixième place à l’arrivée.

Quelques mois plus tard, en plein milieu de la saison 1971, Gethin s’engage avec BRM où il remplace Pedro Rodriguez, décédé sur le Norisring. Pour sa deuxième course dans l’écurie du Lincolnshire, l’Anglais signe un succès magistral qui restera pendant de longues années comme la course ayant produit le plus petit écart à l’arrivée et qui fut, jusqu’en 2003, la course la plus rapide de l’Histoire.

Pourtant, le succès de Gethin en Formule Un restera éphémère, malgré une victoire lors d’une course hors championnat, disputée un mois après Monza, sur le circuit de Brands Hatch. Privée de ses deux chefs de file – Rodriguez et Siffert, morts en 1971 -, BRM connaît une saison 1972 chaotique, malgré la victoire retentissante de Jean-Pierre Beltoise au Grand Prix de Monaco. Gethin retourne alors en Formule 5000 où il remporte la Tasman Series dès sa première saison, puis la Race of champions, restant le seul pilote de Formule 5000 à avoir dompté les pilotes de F1, lorsque les deux séries s’affrontaient.

Le britannique fera un retour épisodique au Grand Prix du Canada 1973, en remplacement de Clay Reggazzoni, chez BRM. En 1974, il remplace Guy Edwards, poignet fracturé, pour le Grand Prix de Grande Bretagne, son 30ème et ultime Grand Prix en Formule Un, dont il ne verra cependant pas l’arrivée.

Peter Gethin se tourna par la suite vers le management de pilotes avant d’être nommé Team Manager de l’écurie Toleman, en 1984, avant que l’équipe ne passe sous les couleurs de Benetton.

Il s’est éteint, lundi, des suites d’une longue maladie, à l’âge de 71 ans.