Pirelli : Plus de pneus à Barcelone, mais pas pour tout le monde ?

Cinquième du Grand Prix de Chine 2013, Jenson Button aura dû faire preuve de « discipline » pour ménager ses gommes sans céder à la tentation de trop attaquer ou de défendre sa position, afin de faire fonctionner la stratégie à deux arrêts concoctée par McLaren : « C’était une façon inhabituelle de faire la course, c’était un peu comme être au Mans dans une voiture de LMP2 avec des LMP1 juste derrière vous, mais ça a fonctionné. »

Si la stratégie mise en place par McLaren avait avant tout pour but de compenser les faiblesses de la MP4-28 en misant sur l’endurance, certains regrettent cependant que les pilotes soient désormais davantage contraints de gérer leurs gommes plutôt que de faire la course : « Peu importe la charge en carburant que vous avez dans la voiture, si vous vous battez contre d’autres pilotes, vous êtes dans la panade. On ne fait plus de la course, on met les pneus et on essaie simplement de rejoindre l’arrivée, » se lamentait Mark Webber, ce dimanche, dans les colonnes d’Autosport.

Même son de cloche chez Mercedes : « Il faut se demander s’il est nécessaire que les pneus soient autant à la limite lorsque tout le monde doit rentrer aux stands juste après le départ. C’est tellement compliqué, notamment pour les spectateurs, » juge Niki Lauda, président non-exécutif de l’écurie allemande, auprès de l’agence de presse APA. Cela s'observe notamment lors des qualifications, où les pilotes sont contraints d'anticiper sur leur stratégie de course et donc de rouler à l'économie, comme ce fut le cas pour Jenson Button ce week-end : « En Q3, il y avait une voiture dans les garages et deux pilotes qui roulaient comme Morgan Freeman dans Miss Daisy et son chauffeur : j’étais l’un de ceux-là. »

« Je ne pense pas que ce soit bien pour tous les pilotes de rouler à 70% de leur capacité pendant une large partie de la course, » confiait pour sa part Christian Horner, aux médias présents à Shanghai. « Ils veulent attaquer aussi fort qu’ils le peuvent. Ils ne veulent pas rouler à l’économie. Pirelli est une entreprise très compétente et je suis sûr qu’ils vont rapidement résoudre ça. »

Sur l’antenne de la RTL, Niki Lauda se faisait ainsi oiseau de bonne augure en indiquant qu’une décision avait été prise pour le bien de la discipline : « Pirelli a un plan. Je peux annoncer la bonne nouvelle : la situation va changer à partir de Barcelone. Ensuite, ça ira mieux. C’est juste qu’il y a tellement de confusion. Les pneus doivent durer plus longtemps. » Ainsi, le manufacturier italien proposerait-il un nouveau mélange, plus dur que le plus dur des composés 2013, ce qui pourrait éventuellement décaler toute la gamme proposée par Pirelli, les actuels pneus Tendres devenant les Super Tendres et ainsi de suite.

Cependant, pour l’heure, aucune annonce n’a été faite par Pirelli concernant l’introduction d’un nouveau composé, plus dur, alors que la firme milanaise avait déjà démenti tout projet de changer ses gommes sans avoir l’assentiment de toutes les écuries, ce qui est loin d’être le cas. Mais Pirelli a malgré tout accepté d’opérer quelques ajustements pour permettre plus d’action en piste, notamment lors des essais libres. Ainsi, si à l’heure actuelle, les écuries disposent de 11 trains de pneus dès le début du week-end, Pirelli pourrait en allouer un douzième aux écuries alignant un pilote débutant lors des essais libres 1 : « Il y a eu des discussions à propos de pneus supplémentaires en essais libres 1, » explique Paul Hembery, directeur de la compétition chez Pirelli. « De manière générale, les écuries ont demandé un nouveau produit parce qu’elles ne roulent pas le vendredi matin. Il y a une heure et demie d’essais et ils ne roulent que pendant la dernière heure. Une suggestion qui a été faite par Bob Fernley, directeur adjoint de l’écurie Sahara Force India, était que s’ils pouvaient disposer d’un produit qui leur permettrait de faire davantage de tours en essais libres 1, ils seraient disposés à faire rouler leur pilote de réserve ou de jeunes pilotes qui ont la Formule 1 pour objectif et leur donner ainsi une expérience de la F1. C’est quelque chose que nous sommes heureux de promouvoir. »

Cependant, contrairement aux allégations de Bernie Ecclestone qui affirmait en Chine que l’affaire était conclue, Pirelli doit encore recevoir l’approbation des écuries et de la FIA : « Nous pouvons mettre cela en place pour Barcelone mais les détails doivent être décidés par les équipes et Charlie Whiting. » Et Hembery d’ajouter : « Les écuries doivent encore se mettre d’accord en détail sur la manière dont ces pneus seront utilisés. Certaines écuries de pointe ne feront pas appel à un jeune pilote ou à leur réserviste, mais les petites écuries ont vraiment envie qu’on fasse ça. »

Ce système n’est pas sans rappeler l’initiative prise, au milieu des années 2000, de limiter à un le nombre de voiture par écurie pouvant participer lors des essais libres 1, sauf pour les écuries alignant un pilote débutant, un dispositif qui avait notamment permis à Sebastian Vettel d’émerger avec BMW. Cela ne répondra cependant pas aux attentes des écuries et pilotes de pointe concernant la tenue des pneus, un point où, là aussi, certains pourraient ne pas y voir leur intérêt.