F1

Ecclestone espère aller au Bahreïn en 2012

Bien que le Grand Prix du Bahreïn ait été confirmé lors de la dernière réunion du Conseil Mondial de la FIA, Bernie Ecclestone admet que la course pourrait être remise en question si des preuves intangibles de la poursuite des violences lui étaient présentées, mais ne se veut pas donneur de leçon et invite la F1 à attendre de voir la situation de ses propres yeux avant de juger.

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Bien que sa présence au calendrier 2012 ait été confirmée lors de la dernière réunion de Conseil Mondial de la FIA, la situation du Royaume du Bahreïn ne prête guère à l’optimisme - et au tourisme -, malgré les réformes promises par le roi et attendues par les contestataires. Si l’attentat, récent, contre l’ambassade britannique au Bahreïn en est un signe fort, le rapport de la Commission d’enquête indépendante sur la contestation au Bahreïn amène à s’interroger sur le bien fondé, pour la F1, de se rendre dans un pays toujours en proie à la violence et portant les stigmates de la répression infligée au mouvement de contestation dit de la « Place de la Perle ».

Cette Commission indépendant a en effet conclu que les autorités avaient « eu recours à un usage injustifié et excessif de la force », dénonçant la torture « pratiquée de façon délibérée » afin d’arracher des aveux, de punir les contestataires ou bien par simple vengeance. Missionnée par le roi Hamad Ben Issa Al-Khalifa en personne, la Commission assure que ces actes ne répondaient pas à des ordres des autorités bahreïnies, mais reproche à ces dernières de ne pas être intervenue pour « arrêter les mauvais traitements de la part des responsables ».

Pas plus tard que vendredi dernier, les forces anti-émeute ont dispersé avec violence un convoi de manifestants qui tentait de rejoindre la désormais célèbre place de la Perle de Manama, capitale du pays, alors que Matar Matar, ex-député du principal groupe d’opposition – Wefaq -, affirme que « des manifestants ont été violemment battus […] les blessés préférant ne pas se rendre dans un hôpital public par crainte d’être arrêtés. »

Alors que les observateurs de la F1 s’interrogent sur la nécessité d’un retour de la F1, dès 2012, au Bahreïn, Bernie Ecclestone assure avoir pris connaissance du rapport de la Commission d’enquête : « Oui, il y a eu des cas, mais… je voulais y aller. J’étais heureux d’y aller. J’aimerais me rendre dans ces prisons, dans ces hôpitaux ou n’importe où, et demander ce qu’il s’est vraiment passé » explique le Britannique dans une interview accordée au Guardian. Le grand argentier de la F1 assure cependant avoir reçu des garanties de la part des autorités locales : « J’ai demandé ce qu’il se passait vraiment et ils ont répondu qu’il n’y avait pas de problème. Le risque, si vous allez là-bas, c’est qu’on vous emmène dans le meilleur hôtel, qu’on vous invite à dîner et qu’ensuite on vous reconduise à votre avion. »

Souvent critiqué pour le fait d’accorder des Grand Prix, à grand coup de dollars, de roubles ou de yuans, parfois au mépris des droits de l’Homme, Bernie Ecclestone, tel saint-Thomas, ne croit que ce qu’il voit et appelle à laisser le bénéfice du doute au Bahreïn : « Peu importe où l’on va, au moment où vous descendez de l’avion, où vous visiter le pays de quelqu’un, vous devez respecter leur mode de vie, leur religion, leurs lois ou quoique ce soit d’autre. Ce n’est pas correct d’aller dans un pays et de leur dire qu’ils doivent changer. N’y aller pas. Si vous savez qu’il s’y passe quelque chose de mal, abstenez-vous. »

Bernie Ecclestone invoque alors son expérience passée : « Nous avons arrêté d’aller en Afrique du Sud il y a des années, à cause de l’Apartheid. J’y ai été témoin de choses qui m’ont dérangée. […] J’espère que nous irons au Bahreïn et qu’il n’y aura pas de problèmes, que la course se passera normalement, que le public sera heureux et qu’il n’y aura pas de drames. C’est ce que j’espère. »

Pourtant, dans le Daily Mail, Mark Webber, rare pilote à s’être publiquement opposé à l’organisation du Grand Prix du Bahreïn en 2011, réitérait ses doutes avant que la course ne soit confirmée au calendrier par le FIA : « Le temps est un remède, et les gens passent éventuellement à autre chose. Est-ce que cela sera suffisant dans cette situation ? On en saura un peu plus dans les prochains moins. De toute évidence, les bahreinis ont entamé une lutte et sont très, très loin des discussions sur un évènement sportif. C’est évidemment quelque chose de très sérieux qui se passe et qui pourrait, possiblement, continuer. »

L’Australien estime donc qu’il faut « prendre le temps de la réflexion et c’est pourquoi Bernie a autant de courses prévues au calendrier, parce qu’il sait que certaines d’entre elles, que ce soit pour des raisons commerciales ou des raisons politiques, comme dans le cas du Bahrein, pourraient être vulnérables. »

Bernie Ecclestone admet d’ailleurs que si des preuves incontestables venaient attester de la persistance de violences au Bahreïn, il « devrait sérieusement y réfléchir » mais rappelle néanmoins qu’aucun pays n’est irréprochable : « Nous sommes allés en Argentine alors qu’il s’y passait des choses dramatiques [ndlr : coup d’état, dictature militaire, guerre des Malouines]. Il y a eu des drames au Brésil [ndlr : dictature miliaire établie en 1964]. Des mauvaises choses s’y sont passées. Je pense qu’on peut regarder n’importe où, on ne trouvera personne d’irréprochable. L'Angleterre est-elle irréprochable ? Il y a des atrocités terribles que nous avons commises » interroge Bernie Ecclestone, dans The Guardian, en faisant référence à l’histoire plus ou moins récente de la Grande-Bretagne.

Toujours est-il, donc, que, fondamentalement, le cas de Bahreïn ne fait qu’illustrer la complexe – et souvent ambiguë – relation qu’entretiennent le sport et la politique : revendiquant régulièrement sa neutralité face aux conflits politiques, s’enorgueillissant parfois même de son universalité qui transcende les différences et les conflits, le sport peut-il pour autant rester aveugle face aux souffrances de minorités ou de peuples, au risque parfois d’offrir une vitrine à des régimes répressifs ? Telle est la question...

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6 commentaires
  1. Gravatar Steve
    SteveLe 12/12/2011, 23:44
    "Ecclestone espère aller au Bahreïn en 2012."

    Il est bien le seul.
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  2. Gravatar Nioulargo
    NioulargoLe 13/12/2011, 10:08
    @Steve@ oui c est surement sans vouloir voir l'actualité de ce pays qui n'a pas changé depuis l'année dernière.
    dommage que Webber soit le seul pilote à s'opposer ouvertement à ce grand prix
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  3. Gravatar Dino
    DinoLe 13/12/2011, 12:18
    Oui mais sur le fond, Bernie à raison : pourquoi on n'irai pas au Bahreïn alors qu'on est allé dans des pays tout aussi recommandables comme l'Argentine et le Brésil, sous régime de dictateur, l'Espagne franquiste, l'Italie des années de plomb, la Grande-Bretagne qui elle aussi a été impliquée dans des affaires de tortures sur des prisonniers, et que dire des Etats-Unis où l'on va prochainement et de l'Afrique du Sud où on est allé pendant des années, avant de se souvenir que l'Apartheid y sévissait.

    C'est tout le problème de sport qui se prétend neutre face à la politique, ce qui est une position intenable.
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  4. Gravatar Nioulargo
    NioulargoLe 13/12/2011, 12:24
    il est certain que l'on peut dire ..on a toujours fait ainsi et continuer mais on peut aussi changer....
    Répondre
  5. Gravatar Dino
    DinoLe 13/12/2011, 13:56
    Mais je suis tout à fait d'accord, mais Bernie serait bien mal placé pour faire aujourd'hui la morale au Bahreïn, lui qui nous emmène en Chine.

    Si on fait une comparaison, si la F1 décidait - pour des raisons politique et non de sécurité - de ne pas aller au Bahreïn, elle se retrouverait dans la situation de nombreux pays occidentaux qui se sont posés en libérateurs du peuple libyen et qui trainent aujourd'hui les pieds face aux souffrances du peuple syrien.

    Bernie ne fait que jouer le même jeu que l'an dernier, c'est à dire celui qui croit à la présence du Bahreïn au calendrier, mais qui devra céder face aux inquiétudes des écuries et pilotes pour leur sécurité : il ne peut pas faire autrement, sous peine, sinon, de créer un précédent qui l'obligerait à remettre en question de le Grand Prix de Chine ou encore le futur Grand Prix de Russie.

    Je ne dis pas que c'est bien, mais, du point de vue de Bernie, il n'a pas d'autre choix. C'est donc au pilotes et écuries de faire entendre leurs voies, mais ils ont été très discrets à ce sujet.

    Il faut aussi prendre en compte les signes qui sont envoyés par les autorités du pays qui ont missionné une Commission indépendante qui a dévoilé ses conclusions, publiquement, en présence du roi. Ce dernier s'est engagé à faire des réformes : indirectement, la F1 est aussi un moyen de pression sur les autorités.

    Le boycott du Grand Prix n'amènerait rien selon moi. Honnêtement, c'est parce que le Bahreïn est confirmé qu'on s’intéresse à nouveau à la situation du pays, mais je doute que la grande majorité des fans se soit intéressé de près à l'actualité du Bahreïn ces six derniers mois. Si aujourd'hui on dit qu'on ne va pas au Bahreïn, on va tous être content, mais dans 3 mois, plus personne n'en aura rien à faire de ce qu'il se passe au Bahreïn. Le maintien du GP maintien l'attention médiatique sur le pays, mais la F1 doit rester vigilante et je suis personnellement convaincu que nous n'irons pas au Bahreïn en Avril.
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  6. Gravatar Steve
    SteveLe 13/12/2011, 15:05
    Sans faire trop de politique, cette histoire me fait penser aux manifs avant les JO de Pekin en 2008 (ils appelaient à boycotter les jeux car les droites de l'homme sont baffoués, etc...).
    Et deux ans après, ils nous font tout un fla-fla autour de l'expo universelle à Shanghai, sans aucune manifestation particulière.

    Bref, tout ça pour dire que le sport évolue dans un monde très complexe et que si on commence à enlever les grands prix qui se courent dans des pays où il se passe des choses pas net, et ben il resterait pas beaucoup de courses à nous mettre sous la dent.

    Mais c'est vrai que le cas de Bahrein est révélateur du silence des écuries sur le sujet. Bernie mène le jeu, quoi qu'on en dise, ça me tarde de voir son (ses) successeur(s) à l'oeuvre.
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