Chaque saison, en décembre, vient le temps des bilans de la saison. Qui mérite l’éloge, et qui mérite le blâme ? Faisons place aux sésames…
Jacques Caribou, conseiller de la rubrique hippique de Vassal Pius ("pieux" en latin), la seule gazette du royaume. Ancien champion (en l'an de grâce 1197), Jacques Caribou est autant réputé pour son expertise que pour son franc-parler.L’ancien recteur de Luthus, Roland Boulet, est parti à Woking, chez Mate la Reine, où il a été anobli et est devenu Roland de Boullier.
LE COMTE DE MONCET
Voici venu le temps, en ce mois de décembre,
Des épilogues tristes et des rares dithyrambes.
Le spectacle s’enfuit dans l’horizon morose ;
Il reviendra en mars, à ses côtés la rose.
JACQUES CARIBOU
Décernons désormais le Prix de Charlemagne ;
Il célèbre celui pour qui le doux champagne,
Tout en haut des podiums, fut souvent le délice.
J’annonce le vainqueur. Nous disons : Sir Lewis !
SIR LEWIS
Je suis bien sûr ravi de la noble attention.
Cependant laissez-moi tout à ma déception
D’avoir laissé Nico par trois fois triompher.
- Je préférais partir sur un dernier succès.
LE COMTE DE MONCET
Il râle, le bougon ! Est-il mauvais gagnant ?
Passons. Voici le Prix du plus Morne Manant.
JACQUES CARIBOU
Des honneurs du podium le Ciel a cru exclure
Une illustre écurie vers les limbes obscurs.
ROLAND DE BOULLIER
Me voici, compagnons. Je suis même en avance.
(A voir notre saison, l’exploit est d’importance.)
JACQUES CARIBOU
C’est au sein de Woking que vous ramènerez
Le Prix du déshonneur, mon cher Roland Boulet.
ROLAND DE BOULLIER
Pardonnez-moi, Monsieur, où est ma particule ?
JACQUES CARIBOU
Elle a souffert, hélas, de votre ridicule.
LE COMTE DE MONCET
Poursuivons, chers amis ! A qui sera remis
L’un des plus convoités et plus courus des Prix ?
Le Prix du Jeune Loup récompense le Page
Qui eut de la contrée le plus prompt mûrissage.
JACQUES CARIBOU
Le Prix du Jeune Loup (il a fait consensus)
Sera bientôt remis à Max the Minimus !
LE COMTE DE MONCET
Nous devons l’excuser de n’être point venu ;
Son père l’interdit de voir tout inconnu.
JACQUES CARIBOU
Le Prix du Transparent récompense à sa guise
Celui dont l’existence est par chacun omise.
Nous accueillons, Messieurs, un Suédois aphone.
Nous jurons qu’il existe ! Il se nomme Ericsson.
SIRE ERICSSON
Bonsoir, mes deux amis. Vous me reconnaissez ?
LE COMTE DE MONCET
Déguerpissez, Monsieur ! Nous attendons un homme.
SIRE ERICSSON
N’était-ce pas Marcus ? Le voici en personne.
LE COMTE DE MONCET
Impossible, voyons, nous savons son visage.
Il vient du Nord lointain et a un blond pelage.
SIRE ERICSSON
C’est bien moi, je vous dis ! Je me nomme Ericsson !
JACQUES CARIBOU
Mais oui, bien sûr, filez ! Attendez qu’on vous sonne.
LE COMTE DE MONCET
Puisque Sire Ericsson nous a tous fait défaut,
Remettons dans la joie le Prix du Bourricot.
JACQUES CARIBOU
Il s’agit de railler une suprême idole.
C’est notre maître à tous. Voici Pastor le Fol !
LE COMTE DE MONCET
Hélas, mon cher Jacquot, nous sommes malchanceux !
On m’apprend qu’en venant jusqu’en ce noble lieu,
Pastor le Fol aura, au détour d’une voie,
Abîmé son chariot et détruit son convoi !
JACQUES CARIBOU
Nous pouvons donc passer au Prix du Polochon.
Comme Berger jadis, cet homme mollasson
S’endort chaque dimanche et nous paraît vieilli.
Je vous prie de réveiller l’illustre Olaf Kimi !
OLAF KIMI
Je suis très honoré. L’émotion m’envahit.
JACQUES CARIBOU
Oh, voyez donc, Moncet ! Le Kimi a souri !
LE COMTE DE MONCET
En êtes-vous bien sûr ? Je n’ai rien vu de tel.
Chez la vieille catin vous voyez la pucelle.
JACQUES CARIBOU
Eh là, Monsieur le Comte ! Et votre bienséance ?
LE COMTE DE MONCET
Elle est partie, je crois, avec mon ignorance.