F1

Héros, murs et surprises : 7 faits marquants du Grand Prix du Canada

Le Grand Prix du Canada s'installe ce week-end sur le Circuit Gilles Villeneuve pour une nouvelle édition. Depuis 1978, cette course a écrit certaines des pages les plus mémorables de la Formule 1. Entre exploits improbables, drames poignants et records inédits, voici sept récits qui ont façonné son identité unique.

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Jean Alesi vainqueur au GP du Canada 1995
© Rick Dikeman, Wikimedia Commons / Jean Alesi vainqueur au GP du Canada 1995

Le Grand Prix du Canada retrouve son écrin montréalais. Depuis près d'un demi-siècle, le Circuit Gilles Villeneuve a accumulé les pages d'anthologie, entre coups d'éclat mémorables et retournements de situation spectaculaires. Ce tracé urbain unique en son genre a consacré des champions et brisé des rêves à parts égales. Avant que la saison 2025 n'ajoute son lot d'émotions, retour sur sept épisodes marquants qui ont fait la légende de ce Grand Prix.

1. 1978 : La première victoire de Gilles Villeneuve à domicile

Le 8 octobre 1978 restera gravé dans l'histoire du sport automobile canadien. Pour la première fois, le Grand Prix du Canada se dispute sur le nouveau circuit de l'Île Notre-Dame. Gilles Villeneuve, au volant de sa Ferrari, démarre depuis la troisième position. La course semble promise à Jean-Pierre Jarier, dont la Lotus domine largement les débats. Mais le destin en décide autrement, car une fuite d'huile contraint le Français à l'abandon.

Villeneuve hérite de la tête de course et résiste à la pression. Les derniers tours sont un calvaire pour le pilote québécois, qui avouera après la course avoir conduit « comme une vieille dame », changeant de rapport à 10 000 tours/minute au lieu des 11 500 habituels. « Allez, tu conduis une Ferrari, Ferrari c'est le meilleur, une Ferrari ne tombe jamais en panne », se répétait-il. La foule de 130 000 spectateurs explose quand la Ferrari rouge franchit la ligne d'arrivée. Cette victoire, première d'un pilote canadien au Canada, transforme Villeneuve en héros national.

2. 1991 : L'erreur fatale de Nigel Mansell

Le 14 juin 1991, Nigel Mansell commet l'une des bourdes les plus spectaculaires de l'histoire de la F1 et offre l'une des fins les plus inattendues. Le pilote britannique dominait alors la course au volant de sa Williams et abordait le dernier tour avec 57 secondes d'avance sur Nelson Piquet. La victoire semblait donc acquise.

En approchant de l'épingle, à deux kilomètres de l'arrivée, Mansell ralentit et salue la foule pour célébrer prématurément son succès. Fatal. Le régime moteur chute trop bas, l'alternateur ne produit plus assez d'énergie pour alimenter le système de gestion moteur, et la Williams s'arrête net. Piquet, incrédule, dépasse son ancien coéquipier et s'empare d'une victoire inespérée.

Mansell reste figé dans sa voiture, à quelques mètres de la ligne d'arrivée. « C'est presque incroyable. J'ai rétrogradé de cinquième en quatrième comme je l'avais fait les 68 tours précédents, puis c'est passé au point mort et le moteur s'est coupé. », expliquera-t-il, amer d'avoir perdu la course de cette façon.

3. 1995 : Les larmes de joie de Jean Alesi

Le 11 juin 1995, Jean Alesi vit enfin son rêve. À 31 ans, le jour de son anniversaire, le pilote français décroche sa première et unique victoire en Formule 1. Au volant de la Ferrari numéro 27, celle de Gilles Villeneuve, Alesi hérite de la tête de course quand Michael Schumacher, alors en tête, rencontre un problème de boîte de vitesses à onze tours de l'arrivée. Ce souci le contraint à un arrêt prolongé et le fait chuter dans le classement, ouvrant la voie à la victoire d'Alesi.

Les derniers kilomètres sont un supplice. « À chaque freinage, mes larmes venaient frapper ma visière », confiera Alesi après la course. « Pendant un tour, je me suis senti un peu désorienté, mais ensuite je me suis dit : maintenant tu dois te remettre à conduire. » Sa Ferrari tombe en panne sèche sur le tour de ralentissement juste après l'arrivée. Schumacher, qui avait terminé la course en cinquième position malgré ses propres ennuis, s'arrête en toute sportivité et ramène le vainqueur aux stands sur sa Benetton, sous les acclamations de milliers de spectateurs qui ont envahi la piste.

4. 1999 : Naissance du "Mur des Champions"

Le virage 14 du Circuit Gilles-Villeneuve gagne ses lettres de noblesse lors du Grand Prix 1999. En l'espace de vingt tours, trois anciens champions du monde s'écrasent contre le mur de béton qui borde la sortie de la chicane finale : Damon Hill au 14ème tour, Michael Schumacher au 29ème, puis Jacques Villeneuve au 34ème tour.

L'accident de Schumacher marque particulièrement les esprits. L'Allemand mène la course quand il perd le contrôle de sa Ferrari et percute violemment la barrière. Sur le chemin du retour vers les stands, un journaliste trop zélé l'interpelle. Schumacher, le visage fermé, lâchera froidement : « Avez-vous un peu de respect pour les humains ? » Cette course se terminera sous Safety Car, une première en Formule 1, avec la victoire de Mika Häkkinen.

Cette série noire baptise définitivement ce mur redoutable. L'ironie veut qu'une banderole « Bienvenue au Québec » ornait alors cette barrière impitoyable. Depuis, Sebastian Vettel, Jenson Button ou encore Kevin Magnussen ont rejoint cette liste peu enviable. La combinaison piste rapide-adhérence faible-virage technique continue de piéger les meilleurs pilotes du plateau.

5. 2001 : Premier doublé de frères en F1

Le 10 juin 2001, le Grand Prix du Canada entre dans l'histoire de la Formule 1. Pour la première fois, deux frères montent ensemble sur le podium en occupant les deux premières marches. Ralf Schumacher, au volant de sa Williams-BMW, devance son aîné Michael, pilote Ferrari de sept ans son aîné.

La course démarre avec Michael en pole position, Ralf à ses côtés sur la première ligne. Le champion du monde en titre prend naturellement les devants, mais la Williams de son cadet affiche rapidement un rythme supérieur. « Ma voiture était incroyable. », expliquera Ralf après la course.

L'issue de la course se joue dans les stands. Michael effectue son arrêt au 45e tour, Ralf patiente jusqu'au 51e tour avant de s'arrêter à son tour. Cette stratégie porte ses fruits, et le benjamin ressort en tête et ne lâchera plus sa position. « J'ai essayé de le dépasser plusieurs fois, mais il ne me laissait pas passer. J'ai donc attendu les arrêts aux stands », racontera Ralf, qui s'impose avec plus de 20 secondes d'avance sur Michael.

L'ambiance restera, toutefois, cordiale entre les deux frères. « C'était le meilleur à qui perdre. Je suppose que mes parents seront contents. », confiera Michael, souriant à l'arrivée. C'est ainsi que devant 111 000 spectateurs, les Schumacher ont offert un spectacle inédit avec cette fraternelle qui reste unique dans les annales de la F1.

6. 2007 : Lewis Hamilton signe sa première victoire

Le 10 juin 2007, Lewis Hamilton entre dans l'histoire de la Formule 1. À seulement 22 ans et pour sa sixième course en Grand Prix, le pilote McLaren décroche sa première victoire au Circuit Gilles-Villeneuve.

Le pilote britannique part en pole position, sa première également. Dès le départ, il résiste aux attaques de son coéquipier Fernando Alonso, double champion du monde en quête d'un troisième titre. L'Espagnol commet une erreur au premier virage et se retrouve dans l'herbe, permettant à Nick Heidfeld de prendre la deuxième place.

La course se transforme rapidement en chaos avec quatre interventions de la voiture de sécurité. L'accident spectaculaire de Robert Kubica marque les esprits, le pilote BMW s'écrase violemment dans les barrières, son monocoque volant d'un mur à l'autre. Miraculeusement, le Polonais s'en sort avec une entorse à la cheville.

Malgré les multiples neutralisations, Hamilton gère parfaitement chaque relance. Le jeune Britannique franchit la ligne d'arrivée avec plus de quatre secondes d'avance sur Heidfeld. « J'étais prêt depuis longtemps pour cette victoire, c'était juste une question de où et quand », confiera-t-il après la course, avant de déclarer, ému : « Je dédie cette victoire à mon père, sans lui rien n'aurait été possible. » Cette première victoire lance une carrière qui le mènera vers sept titres mondiaux.

7. 2011 : Jenson Button remonte l'impossible

Le 12 juin 2011 offre l'une des courses les plus folles de l'histoire de la F1. Sous une pluie battante, Jenson Button vit un calvaire : collision avec son coéquipier Lewis Hamilton, crevaison, pénalité de passage par les stands, nouvel accrochage avec Fernando Alonso. À un moment de la course, le Britannique pointe dernier avec six arrêts au compteur.

Pourtant, quand la piste commence à sécher progressivement, Button retrouve un rythme phénoménal. Il remonte méthodiquement le peloton et rattrape Sebastian Vettel dans le dernier tour. Sous pression, l'Allemand rate son freinage au dernier virage. Button le dépasse et s'impose après 4h04'39'' de course, record de durée toujours d'actualité. « J'ai mené pendant un demi-tour. Incroyable. », résumera-t-il à l'issue de la course.

Ce week-end, le Circuit Gilles-Villeneuve accueillera de nouveaux prétendants à la victoire. Entre les pièges du "Mur des Champions" et les retournements de situation qui ont fait la légende de cette course, une nouvelle page d'histoire pourrait bien s'écrire. Et à Montréal, il faut toujours s'attendre à des surprises.

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