FIA : vers une réélection sous tension pour Mohammed Ben Sulayem
Alors que l'élection présidentielle de la FIA se profile pour la fin de l'année, Mohammed Ben Sulayem semble bien décidé à briguer un second mandat. Soutenu par plus de trente clubs automobiles, il fait néanmoins face à une fronde croissante, menée notamment par l'automobile-club autrichien. En toile de fond : des soupçons de dérive autoritaire et une crise de gouvernance.


Un soutien massif mais organisé. Président de la Fédération Internationale de l'Automobile depuis 2021, Mohammed Ben Sulayem a reçu ces dernières semaines un appui formel et orchestré de 36 clubs membres, parmi lesquels celui dirigé par Fabiana Ecclestone, épouse de l'ex-patron de la F1 Bernie Ecclestone. Dans une lettre ouverte, ces clubs saluent son action : « Sans les décisions audacieuses prises dès le premier jour, l'avenir même de la FIA aurait été en péril », écrivent-ils.
Ils se félicitent du « tournant opéré en moins de quatre ans », évoquant la mise en place de « systèmes de gestion professionnels », un rapport plus direct aux membres, et la volonté de redorer l'image de la FIA sur la scène mondiale. En clair : pour ce bloc de soutien, Ben Sulayem a modernisé une structure jugée trop lente, trop rigide, et parfois coupée de ses adhérents.
Les signataires encouragent donc le président à se présenter de nouveau, estimant que quatre ans « est une durée trop courte pour mener à bien les réformes engagées ».
Des voix discordantes au sein même de la FIA
Mais cet élan unanime n'est qu'apparent. L'ÖAMTC (l'automobile-club autrichien) a adressé une lettre au Conseil mondial pour la mobilité et le tourisme dans laquelle il dénonce une gouvernance dysfonctionnelle.
« Les dommages portés à la crédibilité de la FIA ont déjà eu lieu, en raison d'erreurs de gouvernance répétées », déplorent les Autrichiens. La critique ne se limite pas à des couacs isolés : elle vise ce qui serait, selon eux, un système structurellement verrouillé, dans lequel la discussion et le débat ont disparu. L'ÖAMTC va jusqu'à parler d'un « mode de gouvernance défaillant » et d'une « menace pour la réputation internationale de la FIA ».
Parmi leurs craintes les plus vives : certaines modifications récentes des statuts, perçues comme taillées sur mesure pour renforcer le pouvoir du président sortant.
« Là où il y a un risque que ces changements semblent servir l'administration en place plutôt que la FIA elle-même, ils ne doivent pas être adoptés. »
Une présidence marquée par les controverses
Depuis son arrivée à la tête de la FIA, Mohammed Ben Sulayem a dû composer avec une série de polémiques. Son style direct, son rapport parfois conflictuel avec la F1 ou encore ses positions sur certaines figures du paddock ont régulièrement alimenté les critiques. Plusieurs décisions prises sans consultation élargie — notamment autour de la réglementation ou du fonctionnement interne — ont cristallisé les tensions.
« Dans chaque exemple, les changements sont présentés comme nécessaires pour le bien commun, tandis que les opposants sont dépeints comme des ennemis du progrès », résume l'ÖAMTC.
Le problème, selon ses détracteurs, ne serait pas tant dans les intentions que dans les méthodes : une centralisation excessive du pouvoir, une gestion trop verticale, et un affaiblissement des contre-pouvoirs.
Une fracture qui fragilise l'institution
L'opposition autrichienne alerte également sur les risques à long terme. Pour elle, la FIA est désormais perçue comme une organisation « faible dans sa prise de décision, sujette aux erreurs répétées », et pourrait perdre la confiance de ses partenaires : États, sponsors, constructeurs, voire autorités juridiques. Une perte de légitimité qui aurait, à terme, des conséquences majeures sur la capacité de l'organisation à encadrer le sport automobile mondial.
Ben Sulayem conserve néanmoins une base solide de soutiens et semble déterminé à poursuivre son travail. Reste à voir si ces tensions s'apaiseront d'ici l'Assemblée générale annuelle ou si la campagne à venir renforcera les divisions.