Hamilton fait toujours débat dans le paddock
Le pilote McLaren n'a pas éteint le feu des critiques au Canada.


Au terme des deux derniers Grand prix, où Lewis Hamilton s’est en partie distingué par ses manœuvres en piste et ses paroles en dehors, le pilote britannique est sous le feu, nourri, des critiques, alors que Jean Todt affirmait, la semaine passée, qu’une suspension de six courses avait été envisagée.
Certains expliquent ce comportement par une prise de risque maximale de Lewis Hamilton, contraint, d’une certaine manière, de surconduire afin de compenser la différence de performance séparant encore la RB7 de sa MP4-26. Toujours est-il, qu’avant-même le Grand prix de Monaco, le Champion 2008 s’était lui-même désigné comme étant le seul à pouvoir rivaliser avec Vettel, dans l’euphorie de son haletant Grand Prix d’Espagne : « En ce moment, la seule personne qui peut répondre à Sebastian, c’est moi, et dans une voiture qui n’est pas aussi bonne que la sienne, et j’en suis plutôt heureux. »
Le grand Stirling Moss, fraîchement retraité du haut de ses 81 ans, y est allé de son commentaire : « Il va parfois un peu trop loin. C’est un formidable pilote, il est très offensif et enthousiasmant, ce qui est important parce la F1 est désormais un sport spectacle. Mais la manière dont il se comporte n’est pas aussi bonne. Son père n’est plus son manager, ce qui est un problème. S’ils pouvaient retravailler ensemble, ce serait une bonne chose. »
Niki Lauda, qui n’est jamais avare de commentaires, s’est également joint au peloton des critiques : « Ce qu’a fait Hamilton dépasse les limites. Il est complètement fou. On ne peut pas piloter comme ça et quelqu’un va finir par se faire tuer. »
Jackie Stewart, qui s’était déjà montré critique envers Lewis Hamilton au lendemain du Grand Prix de Monaco, tempère cependant la dureté des propos de l’autrichien : « Je pense que Niki y va un peu fort avec Lewis mais c’est un homme qui mérite d’être écouté. Pour finir premier, il faut d’abord finir et non pas rentrer dans les autres, tout le temps. Lewis a trop d’accidents avec trop de pilotes, et il ne peut pas blâmer les commissaires, parce qu’ils sont différents à chaque course. »
Au Canada, c’est en effet Emerson Fittipaldi qui a succédé à Alan McNish au poste de 4ème commissaire. Avant le Grand Prix, le double champion du monde brésilien était revenu sur la polémique qui avait entouré Lewis Hamilton au lendemain du Grand prix de Monaco : « Je pense que Lewis est un talent exceptionnel, un champion du monde, mais parfois il est trop agressif quand il essaye de dépasser » confiait le brésilien au site Totalrace. […] « Je pense qu’il doit y avoir une limite dans l’agressivité, […] on peut être agressif mais il faut respecter les autres. »
Et le compatriote de Felipe Massa de revenir sur la comparaison entre Lewis Hamilton et Ayrton Senna : « Ayrton était un pilote très agressif, mais je n’ai pas le souvenir de l’avoir vu faire ce que Lewis a fait, non seulement à Monaco, mais si vous revenez trois ans en arrière, lors du Grand Prix de Belgique » [ndlr : déclare le brésilien qui semble malgré tout avoir la mémoire sélective]. « Je pense qu’il est spectaculaire. Du point de vue des spectateurs, c’est cool d’avoir un pilote spectaculaire sur la grille, ça fait partie du show, mais il faut respecter les autres pilotes. Quand vous manquez de respect et mettez les autres en position dangereuse, c’est mal. »
Bien que critique, l’ancien pilote McLaren n’en affirme pas moins qu’il n’aurait pas infligé de pénalité à Hamilton pour son accrochage avec Massa, à Monaco, contrairement à Alan McNish : « Nous savons que c’est compliqué de dépasser à Monaco, et si quelqu’un ne veux pas se laisser passer, alors c’est dur d’éviter la collision. […] C’est une situation difficile pour être parfaitement honnête, vous trouverez toujours des positions divergentes à ce propos. »
Lewis Hamilton a d’ailleurs reçu le soutien de son équipe, par le biais de Martin Whitmarsh, tout d’abord : « Je suppose que je ne suis pas le plus impartial, mais je veux voir Lewis attaquer, et, évidemment, je ne veux pas qu’il s’accroche avec les autres voitures. Mais en même temps, s’il se retient, de peur d’avoir un accident, alors il ne sera plus le grand pilote qu’il est et il ne fera plus son travail comme il le fait. Je suis sûr qu’il continuera d’être un pilote très dur et que de nombreux succès l’attendent dans sa carrière. »
Même discours de la part de Norbert Haug, le patron de Mercedes : « C’est un bon pilote, un ami et je ne partage pas les critiques à son propos. […] Bien sûr, il est critiqué, mais ça ne le rendra que plus fort. »
De son côté, invité à se prononcer sur le sujet par la Press Association, Jenson Button déclare : « Lewis fait beaucoup les gros titres en ce moment, en grande partie parce qu’il est sacrément bon. C’est un compétiteur, un battant. C’est la raison qui a fait que je voulais être [chez McLaren], contre et avec un pilote qui est super doué, l’un des meilleurs qu’il ait été donné de voir en Formule Un. »
Les deux pilotes ont d’ailleurs plusieurs fois eu maille à partir sur la piste, mais pour la première fois, au Canada, ils se sont accrochés alors que Lewis Hamilton entreprenait une manœuvre de dépassement sur Jenson Button : « Nous avons beaucoup de respect l’un pour l’autre, nous nous sommes souvent battus tous les deux cette année, et l’année dernière, et nous ne nous sommes jamais touchés, nous nous sommes toujours laissés suffisamment de place » [ndlr : le Grand prix de Turquie 2010 en est d’ailleurs l’une des preuves les plus flagrantes]. « Alors, je ne partage pas ce qu’a dit Niki [Lauda]. Parfois, Lewis a raison, parfois non, mais il en va de même pour nous tous. Il se trouve juste dans ce genre de situation plus souvent que les autres. »
Le vainqueur du Grand Prix du Canada pense d’ailleurs, comme son patron, qu’il serait inutile de chasser le naturel : « Vous ne pouvez pas vraiment changer en tant que pilote. J’ai réalisé une interview avec Alain Prost, à Monaco, et il a dit que la manière dont on pilotait, révélait votre caractère et la personne que vous êtes. Quand vous l’entendez parler, il est très calme et c’est exactement ce qu’il était sur le circuit. »
A en lire les déclarations de Lewis Hamilton, on comprend donc que son enthousiasme et sa passion le mènent parfois à la sortie de route, qu’elle soit verbale ou sportive.