27 septembre 1925 : Il y a 100 ans, la construction du Nürburgring débutait
Plus grand circuit du monde, le Nürburgring s'apprête à souffler ses 100 bougies. En un siècle, ce tracé situé dans le massif de l'Eifel a vu défiler certaines des plus belles voitures au monde, mais a malheureusement été le cimetière de nombreux pilotes.

Un nom évocateur. Souvenirs, spectacle, performance, légende, drames. La liste des adjectifs pourrait être longue. Le Nürburgring, c’est le circuit le plus fou de tous. Oui, il a été en concurrence avec de nombreux tracés routiers au fil de l’histoire. Mais lequel subsiste toujours ?
Eh oui, le Nürburgring. Ce géant tracé sur les montagnes de l’Eifel, au milieu de la forêt. Une spécificité qui apporte un côté bucolique, qui ramène à la nature, mais surtout à un aspect dangereux. Bien avant notre ère moderne, une sortie de piste était synonyme de grand danger. Voire de mort. Sympa, non ?
Un circuit hors normes
5,1 kilomètres ? Eh non… Au début, le Nürburgring était bien plus long. Non plus, ce ne sont pas les 20,8 kilomètres de la Nordschleife qui étaient utilisés. Le circuit pouvait faire 28,265 kilomètres utilisant ainsi les deux boucles du site : la nord et la sud.
Mais elles n’ont que rarement été utilisées. Pour les Grand Prix, les pilotes empruntaient la boucle nord, qui partageait quelques morceaux avec la sud. La ligne droite des stands et celle passant de l’autre côté étaient utilisées par les deux pistes.
Un défi de 22,810 kilomètres à relever. Immense. Même si ce n’a pas été le circuit le plus long pour la Formule 1, il a été le plus relevé. Bordé d’arbres. Des courbes rapides. Des portions sinueuses. Des virages à l’aveugle. Un dénivelé important. Et parfois, les quatre roues en l’air. Comment ne pas se souvenir de ces clichés où les Formule 1 des années 1960 ne touchaient de temps en temps plus le sol. Même dans une vidéo devenue légendaire, Jackie Stewart, dans une voiture de route, détaillait ce tortueux circuit à un journaliste.
Voilà un court résumé de ce qui est appelé « l’Enfer vert » depuis que le triple champion du monde écossais l’a surnommé ainsi. « Si un pilote vous dit qu’il n’a pas peur sur le Ring, il existe deux possibilités : soit il ment, soit il ne va pas assez vite pour comprendre ce qu’est le Ring », avait tendance à dire celui qui a en partie écrit sa légende avec Tyrrell.
Voilà le travail réalisé par l’Allemagne qui voulait son circuit. Car oui, dans les années 1920, les pays voisins disposaient de leur tracé : la France, l’Italie, le Royaume-Uni… Pour le construire, de nombreux chômeurs ont été engagés et ce dernier a été bâti à proximité des carrières de l’Eifel. Cette région était très pauvre et ce chantier et les activités menées ici ont permis de développer une sorte de tourisme. Des milliers de mètres cubes de béton ont été coulés, des millions de camions de terre ont été déplacés… Hors normes.
Une reine de la Nordschleife
Un tracé et des personnalités. Au cours de ses 98 ans – car même si la construction a débuté en 1925, il n’a été inauguré qu’en 1927 – de nombreux hommes et femmes ont lié leur histoire avec le Nürburgring.
Le plus célèbre n’est autre que Sabine Schmitz. Plus de 22 000 tours du Ring dans sa vie, tragiquement écourtée à cause d’un cancer. Personne n’a fait mieux. L’Allemande a d’ailleurs remporté à deux reprises les 24 Heures du Nürburgring, en 1996 et 1997. Elle est la seule femme à avoir accompli cette performance. Le premier virage de la boucle nord porte depuis la mi-2021 son nom.
La première légende du circuit ? Rudolf Caracciola. Un Allemand aux origines italiennes. Né en 1901, il a passé le permis à 15 ans avant d’enchaîner des petits boulots ici et là avant d’intégrer un site Mercedes à Dresde où il vendait des voitures. Ici, grâce à son talent, les ventes de voitures avec l’étoile sur le capot ont explosé. Doté d’un talent évident pour la course, il a notamment remporté le Grand Prix d’Allemagne 1926 sur l’Avus, sous la pluie. Une performance de haut vol qui lui a permis d’être surnommé « Regenmeister », comprenez le Roi de la pluie en français.
D’autres grands noms comme Bernd Rosemeyer, Hans Stuck ou Jackie Stewart sont intimement liés à cet immense parc d’attractions dessiné au milieu de la forêt de l’Eifel.
Une météo capricieuse
Une situation géographique propice à une météo instable. Il est fréquent de voir sur des circuits de Formule 1 la pluie s’abattre sur une seule partie du tracé. Alors avec plus de 20 kilomètres de piste, le risque augmente largement.
L’hiver, l’épaisse couche de neige qui recouvre cette partie du massif de l’Eifel donne lieu à des compétitions de ski de fond ou de chiens de traîneau.
Condamné en 1976
Il était en sursis depuis de nombreuses années. Dès 1970, des pilotes ont appelé à le boycotter : Jochen Rindt en chef de file. Même si l’Autrichien adorait piloter ici et dompter ses 170 virages, aucune glissière de sécurité ne permettait à un pilote de ne pas terminer dans les arbres ou dans la végétation en cas de sortie de route.
Alors, face aux pressions du GPDA, le Grand Prix d’Allemagne a été déplacé à Hockenheim, que Jochen Rindt a remporté. Les propriétaires du Nürburgring ont alors réalisé des investissements massifs en termes de sécurité et pour le mettre aux normes. Résultat : la Formule 1 est revenue sur le Nürburgring.
Mais en 1976, de nouvelles contestations ont eu lieu. Cette fois portées par Niki Lauda. Face à ce geste, de nombreux observateurs l’ont considéré comme un « trouillard ». Des remarques peu justes puisque l’Autrichien a été le premier homme à passer sous la barre des sept minutes sur la Nordschleife en 1975.
Mais peu importe, ses revendications, soutenues par d’autres pilotes, n’ont pas abouti. Les investissements massifs réalisés auparavant ont permis de maintenir l’organisation du Grand Prix. Une course vraiment dramatique.
Alors que le ciel était très clair le matin, le vent a amené des nuages au-dessus de la piste au cours de l’après-midi faisant chuter quelques gouttes. De nombreuses portions étaient détrempées, comme sur la ligne droite de départ. Les pilotes ont alors chaussé des gommes adéquates, sauf Jochen Mass, qui, bien informé, a voulu prendre des slicks. Bon choix puisque la majeure partie du tracé avait séché.
À la fin de la première boucle, le peloton est passé dans les stands changer de monture. Niki Lauda aussi. Alors en lutte pour le titre, l’Autrichien a voulu remonter dans la hiérarchie. Une fois ressorti, il a roulé à fond. Et dans la petite cassure juste avant Bergwerk, à environ 10 kilomètres du départ, la Ferrari a cassé sa suspension arrière et a pris la direction du rail. Le choc a perforé le réservoir de la 312 T2 et a embrasé la voiture floquée du numéro 1.
Deux pilotes ont percuté la Ferrari en perdition avant de porter secours à Niki Lauda. Deux autres concurrents sont venus les aider. Après de nombreuses secondes dans un brasier à 800 degrés, il a pu être sorti de l’épave. À première vue, son état de santé était stable malgré quelques brûlures apparentes au visage. De paroles de plusieurs pilotes, il était capable de tenir une conversation et de marcher avec de l’aide.
Transféré d’hôpital en hôpital – d’Adenau à Mannheim -, son état s’est finalement aggravé. Les médecins ne lui donnaient pas vingt-quatre heures. Au prix d’une lutte intense, il a vaincu la mort et est revenu à la compétition une quarantaine de jours plus tard.
Beaucoup ont considéré que cet événement avait condamné la Nordschleife. Mais c’est faux. Le contrat avec la Formule 1 était arrivé à son terme et n’a pas été prolongé. Le manque de sécurité évident sur un circuit aussi long en était la raison principale. Le délai d’intervention de l’ambulance pour prendre en charge Niki Lauda ne serait plus convenable aujourd’hui.
De gros travaux ont alors été entrepris. Divers tracés ont été imaginés. Et à la place de la Sudschleife, la piste Grand Prix que l’on connaît aujourd’hui a vu le jour. Celle-ci a très légèrement évolué au fil des années, notamment dans le premier secteur.
Drames en série
Malgré des travaux pour améliorer la sécurité d’année en année, la boucle nord du Nürburgring reste un piège. Chaque virage peut conduire un véhicule dans le rail. Ce n’est pas pour rien si les motos n’ont plus le droit d’y rouler lors des séances ouvertes au public. « Les différences de dynamique de conduite entre les deux et les quatre roues présentent un risque de confusion, en particulier pour les motocyclistes. Afin de rendre l’expérience de conduite plus sûre pour tous, les voitures et les motos seront strictement séparées à l’avenir », justifiaient les responsables du circuit en février 2025.
Lors de cette année, la Nordschleife a été touchée par des événements tragiques. Plusieurs personnes y ont trouvé la mort et un accident très violent a fait le tour du monde. Une Porsche et une BMW se sont accrochées dans la section très rapide avant le Flugplatz. La Porsche a été littéralement détruite et avait pris immédiatement feu.